Prolongation de la durée de vie des centrales nucléaire - ALTEN Group

Prolongation de la durée de vie des centrales nucléaire

Une photo des deux porteurs de projet. A gauche, Joan Giraudeau, Team Leader Fondateur de Plateau Service Nucléaire, à droite, Adrien Cognet, Ingénieur et Spécialiste Nucléaire chez ALTEN.

Joan Giraudeau, Team Leader Fondateur de Plateau Service Nucléaire (PSN), ainsi que Spécialiste Nucléaire chez ALTEN, et Adrien Cognet, Ingénieur et Spécialiste Nucléaire chez ALTEN, échangent leurs points de vue sur ces défis.

Interview L’accident de Fukushima en 2011 au Japon a eu un impact majeur sur les préoccupations de sûreté, en France et dans le monde. Aujourd’hui, la sécurité a été renforcée et une nouvelle génération de centrales nucléaires est en préparation. Mais il faudra du temps pour que ces nouvelles centrales soient opérationnelles. Parallèlement, la demande d’énergie continue de croître. Dans le même temps, de nombreuses centrales existantes sont encore en état de fonctionner. Pour maintenir ces centrales en activité, il faut agir sur deux fronts principaux : assurer la sécurité de leur fonctionnement et gagner la confiance du public. 


Que faut-il pour maintenir une centrale nucléaire en activité ?

J.G. Les centrales nucléaires françaises de première génération ont été conçues pour être aussi fiables que possible avec les moyens techniques disponibles au moment de leur construction. S’il n’y avait pas de délai d’obsolescence, il a été convenu que dans 40 ans, on étudierait l’évolution des équipements et des technologies, tout en sachant que nos centrales de base pouvaient perdurer plus longtemps. Par conséquent, lorsqu’une centrale a fonctionné pendant 40 ans, nous procédons à des inspections régulières pour assurer une maintenance adéquate – ce que nous appelons le “redémarrage ». L’idée est de permettre aux réacteurs de continuer à fonctionner pendant au moins dix ans.

Quelle est la fréquence de ces inspections et en quoi consistent-elles ?

J.G. Il existe différents types d’inspections. Les plus fréquentes sont les arrêts simples de rechargement, une série d’inspections partielles tous les 18 mois. Nous profitons des arrêts de ravitaillement pour effectuer ces inspections, qui durent environ un mois, et pour faire de la petite maintenance. Il y a aussi des arrêts intermédiaires qui ont lieu tous les trois ans et qui peuvent durer jusqu’à trois mois ; on y fait de la maintenance plus importante. Enfin, tous les dix ans, il y a une grande inspection qui dure six mois. Les inspections décennales impliquent une maintenance beaucoup plus importante, y compris des tests hydrauliques et des tests de confinement.

Parallèlement à ces inspections et rénovations continues, en cours depuis 2014, il y a le grand carénage – une rénovation majeure qui vise à améliorer la fiabilité de nos installations « objectif 40 », leur permettant de continuer à fonctionner dans les années 50 et 60 et au-delà. Ce contrôle complet implique la rénovation et le remplacement de tous les composants jugés nécessaires, tels que les générateurs de vapeur, les turbines, les condenseurs nucléaires, etc. Avec des modifications et une maintenance préventive, nous sommes sûrs de pouvoir porter notre parc initial bien au-delà de 40 ans. Aujourd’hui, nous parlons de 60 ans, et peut-être que lorsque nous aurons atteint 60 ans, nous voudrons l’étendre à 70 ans. Nous actualisons et améliorons également en permanence les normes de sécurité de nos anciennes installations afin de garantir qu’elles atteignent un niveau de sécurité équivalent à celui des nouveaux réacteurs.

Quels sont les facteurs qui pourraient empêcher la prolongation de la durée de vie d’une centrale nucléaire ?

A.C. Les grands événements nucléaires, tels que Fukushima ou Tchernobyl, ont bouleversé l’opinion publique. Un frein sociétal pourrait être une pierre d’achoppement majeure. Par exemple, la centrale française de Fessenheim a été fermée pour des raisons politiques, alors qu’elle présentait de très bons résultats en matière de sûreté, supérieurs à ceux d’autres centrales plus récentes. Pourquoi Fessenheim ? Parce que c’était la plus ancienne centrale nucléaire française et la plus controversée sur le plan politique.

Quels sont les avantages du prolongement de la durée de vie de ces plantes ? Quels sont les enjeux ?

A.C. Je pense que l’enjeu est de taille. D’une part, compte tenu de toutes les ressources et installations nécessaires à la construction et à l’exploitation d’une centrale nucléaire, même un gain d’un an est une aubaine du point de vue de l’environnement et du non-gaspillage des ressources. 

Un autre facteur environnemental important est que, comparée à d’autres sources d’énergie, l’énergie nucléaire est une énergie à faible émission de CO2. Une centrale nucléaire émet très peu de carbone pendant son fonctionnement. Sur l’ensemble du cycle de vie de la centrale, si l’on inclut les travaux de terrassement, la construction, l’exploitation et le transport – des matières radioactives, du nouveau combustible et des déchets -, une centrale nucléaire émet 4 grammes de CO2 par kilowatt heure, selon une étude récente d’EDF. C’est extrêmement faible par rapport aux panneaux photovoltaïques par exemple, qui produisent environ 50 grammes de CO2 lors de leur fabrication. C’est aussi beaucoup moins que le gaz ; même les centrales électriques au gaz naturel sont responsables de 350 grammes d’émissions de CO2 par kilowatt heure. Et bien sûr, c’est beaucoup moins que les centrales au charbon, qui émettent 950 grammes de CO2 pour chaque kilowatt heure d’électricité qu’elles produisent.

L’énergie nucléaire est-elle « verte » ?

A.C. À mon avis, comparée à d’autres sources, l’énergie nucléaire est très verte, mais on ne peut pas dire qu’elle soit strictement verte car sa production implique toujours une petite quantité de CO2 par kilowatt heure. Il serait donc peut-être plus juste de l’appeler « énergie à faible émission de CO2 ». Les réacteurs produisent des déchets radioactifs dangereux que nous devrons gérer pendant des milliers d’années, même s’il s’agit d’une petite quantité.

Il est également important de garder à l’esprit que l’énergie nucléaire nous aide à répondre aux besoins de demain. Par exemple, si nous voulons remplacer les moteurs à combustion interne des voitures par un parc de voitures électriques, nous ne pouvons pas le faire sans des sources d’énergie fiables et puissantes, comme le nucléaire. On ne peut pas non plus transformer le parc thermique en parc électrique en utilisant simplement l’énergie solaire et photovoltaïque. 

Comme les besoins en électricité augmenteront encore à l’avenir, il est crucial d’utiliser l’énergie nucléaire en plus des autres sources d’énergie renouvelables. C’est aussi pour cela qu’il faut prolonger la durée de vie des centrales nucléaires pour répondre à nos besoins croissants en électricité en attendant la nouvelle génération d’EPR.

Faut-il de nouvelles compétences pour gérer ce type de projets ?

J.G. Nous connaissons une pénurie de professionnels qualifiés qui résulte de l’expansion rapide de l’industrie nucléaire et de la récente période de stagnation. C’est toute l’industrie qui est touchée : les experts sont rares et souvent leurs compétences n’ont pas été renouvelées depuis des années. Selon les estimations du secteur, la construction des six nouveaux réacteurs EPR2 nécessitera le recrutement de 100 000 techniciens et ingénieurs d’ici à 2030. Pour répondre à la demande croissante d’expertise nucléaire et renforcer les compétences de nos experts sur les sujets liés au nucléaire, ALTEN a mis en place la Nuclear ALTEN Academy. Cette expertise nous permettra de relever les défis de l’industrie nucléaire dans les années à venir.

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Le nucléaire est de plus en plus considéré parmi les solutions pour pallier aux besoins en énergie tout en garantissant la durabilité des solutions envisagées. Les avantages de l’énergie nucléaire sont d’autant plus prégnants à la lumière des effets du changement climatique et de l’augmentation de la demande énergétique. Le potentiel d’innovation de ce secteur en fait un marché primordial et attractif partout dans le monde.

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